Montessori, oui mais…

Que fait nounoulau avec ses collègues sur la moquette? Elle prépare son déménagement pour l’autre bout du monde? Elle fabrique des meubles recyclables? Elle met en boîte les copines? Non!

Nous sommes en formation avec l’organisme IPERIA sur le thème: « développement et rythme de l’enfant » selon les principes de la méthode Maria Montessori. Notre formatrice, Clémence (organisme de formation « La Source » Saint Cannat), a entrepris de nous présenter cette pédagogie qui s’apparente à une philosophie de vie. Elle veut aussi faire tomber les nombreux préjugés du genre: « c’est une méthode laxiste de l’enfant roi, c’est réservé à l’élite, c’est réservé aux enfants inadaptés, etc. » Des raccourcis véhiculés par ceux qui n’ont pas pris la peine de se renseigner. C’est pour cette raison également que je me suis inscrite à cette formation: j’avais envie de dépasser le phénomène de mode et de rencontrer vraiment Maria Montessori.

Nous voilà parties, avec quelques collègues aussi curieuses que moi, pour des heures de formation. Notre éducatrice (puisque tel est son métier) nous plonge avec passion dans l’étude des grands principes de la pédagogie, nous présente le matériel spécifique et nous explique son intérêt: il doit être adapté à l’âge et aux phases de développement de l’enfant pour l’amener vers l’autonomie. Il doit être auto correctif, isoler les qualités (ne contient qu’un apprentissage à la fois) et fabriqué dans des matières nobles (comme le bois, le tissu). Alternant théorie et pratique, nous découvrons cette discipline positive qui doit permettre à l’enfant de s’épanouir librement mais pas sans cadre.


Clémence nous propose également des activités manuelles amusantes et utiles, créant des moments ludiques dans nos apprentissages (en digne pédagogue Montessori). Nous fabriquons notre propre matériel: des hochets en bois, une boîte de permanence de l’objet (que malheureusement nous n’auront pas le droit d’utiliser avec les enfants en accueil, puisque la PMI ne nous autorise que le matériel aux normes).

Les explications qui vont suivre ne sont pas exhaustives, ce sont des pistes que j’ai retenues sur cette pédagogie que je trouve extrêmement bienveillante. D’après moi, tous les principes ne sont pas applicables dans notre métier d’assistante maternelle (ne serait-ce que parce que l’espace réservé aux enfants interfère avec celui de la famille et aussi du salon…) Je dois avouer sans fausse modestie que nous sommes déjà bon nombre à appliquer d’instinct cette attitude positive qui accompagne l’enfant sans l’étouffer et lui permet de développer son autonomie. Pour ma part, cette formation me rappelle aussi les enseignements pleins de bon sens de ma grand-mère (« gardienne d’enfant » à ses heures, comme on disait à l’époque), mais il est toujours bon de s’appuyer sur les réflexions de pédagogues avertis et d’en tirer des conseils, des astuces et des améliorations pour notre pratique quotidienne.

Biographie

Pour bien comprendre la pédagogie, un petit détour par sa genèse est fort utile. Maria Montessori (1870-1953) est née dans une famille bourgeoise italienne et a la possibilité de faire des études pour devenir institutrice, mais son rêve est de devenir médecin, à une époque où les femmes ne peuvent briguer que le statut d’infirmière. Elle travaille la nuit et obtient son diplôme malgré tout. Elle est la première femme médecin en Europe.
Elle fait son stage en hôpital psychiatrique à Rome en section enfants (maltraités ou abandonnés). Elle étudie Jean Itard (médecin de l’éducation spécialisée, connu pour « l’enfant sauvage« ) et Edouard Seguin (pédagogue de l’éducation des personnes handicapées mentales). Elle commence à inventer le matériel d’encastrement, futur matériel « Montessori », et le teste sur ses petits patients. Comme les résultats sont excellents, le médecin en chef la laisse faire et elle réussit à leur apprendre à lire, alors qu’on les considérait incapables. Ce service lui sert de laboratoire pour améliorer ses méthodes.
Elle crée son école d’orthophonie publique d’état, puis ouvre sa propre école pour TOUS, dans un quartier pauvre de Rome: la Maison des Enfants (de 3 à 6 ans) avec des classes de 50 enfants et 2 adultes. Elle devient professeur d’université et donne des conférences dans toute l’Europe. En 1920, elle crée des écoles 0/3 ans, 6/9, 9/12 et 12/17. Mais en 1940, comme elle refuse d’accrocher des photos de Mussolini dans ses classes, ses écoles sont fermées.
Elle s’exile aux Pays-Bas, en Inde, où elle développe l’aspect métaphysique de sa vision d’une éducation cosmique. Pour elle, qui a vécu les ravages des guerres mondiales, l’éducation doit être « une arme de paix », elle veut développer une méthode universelle pour permettre à l’enfant de devenir un individu qui peut trouver sa voie, avoir un sens social et vivre en paix avec les autres. Comme sa technique s’affine toujours, ses classes évoluent: Le « petit nido » (0/6 mois), le « grand nido » (6/18 mois), la « communauté enfantine » (18 mois/3 ans). Elle est en admiration devant les enfants et leur
esprit absorbant.

(bibliotheques.paris.fr crédit Fondation Montessori)

Observations de l’enfant

L’esprit absorbant


0/3 ans: le développement inconscient se fait avec ce qu’on offre à l’enfant, il absorbe comme une éponge et de façon inconsciente , il enregistre sans faire le tri et fixe les caractères propre à son groupe social. Le bébé subit le traumatisme de la naissance, la période la plus difficile de sa vie, il est séparé mais dépendant de l’adulte, il est très sensible et perçoit les émotions. Il lui faut un environnement particulièrement adapté. Le nouveau né est un embryon spirituel qui porte en lui-même son propre développement. Il n’a pas un caractère prédéfini ni personnalité préétablie. Le développement du langage et de la communication se font dès la naissance. Il intègre les éléments de la prosodie de sa langue maternelle même pendant la grossesse. Le langage est une intelligence supra-naturelle qui nous différencie des animaux, permet la civilisation. La communication, verbale ou non verbale, est à valoriser dès la naissance. Elle est une liberté d’expression qui donne un sens social à la relation.


3/6 ans:
phase consciente pour l’enfant qui a plus ou moins conquis son milieu. Il va vers un affinement de ses compétences, l’acquisition de nouveaux comportements, le travail conscient de ses sens. L’éducateur propose des activités qui répondent à ses besoins, l’enfant cherche à comprendre le fonctionnement des objets. Il a une vie psychique tournée en mouvement. L’intellectuel et le physique sont inséparables: tout le matériel est basé sur la manipulation, allant toujours du simple au complexe, du concret à l’abstrait. Pour absorber la connaissance, il est primordial que l’activité soit spontanée. L’intervention de l’adulte est minimale et utile. L’enfant développe l’esprit mathématique dans son besoin d’exactitude, mais aussi son imagination.


Les périodes sensibles

L’enfant a des attirances pour certaines activités selon le moment de son évolution, des prédispositions intérieures spontanées en fonction de sa croissance et de son développement.

1- L’ordre: l’enfant a besoin d’un cadre dès la naissance, un environnement stable, ordonné et pérenne. Le manque de sécurité crée une angoisse qui empêche le développement. Pour construire son ordre intérieur, l’enfant a besoin d’ordre, de routines, d’horaires.


2- Le mouvement: l’enfant s’élève grâce à l’action. Le but du mouvement est de servir la vie.


3- Le langage: il s’organise entre 0 et 2 ans et vers 5 ans il explose.


4- Le raffinement sensoriel: l’enfant a besoin de stimulations.


5- Les petits objets: l’enfant se passionne pour tout ce qui est miniature (2 ans)


6- Le comportement social: l’enfant est conscient de son individualité, il interagit avec les autres, il affirme sa personnalité (crise du « non ») et veut participer à la vie quotidienne.

Les périodes sensibles s’entremêlent, elles apparaissent de manière spécifique à chaque enfant.Il ne faut pas  contrarier les apprentissages qui sont concordants aux sensibilités de l’enfant, au risque de les rendre plus fastidieux. Cela signifie par exemple de doser notre aide pour laisser l’enfant faire tout seul (dans sa période sensible au mouvement, l’enfant aura envie de boutonner son blouson ou de se servir à boire et c’est l’aider de le laisser faire tout seul). Une fois les périodes sensibles passées, il est toujours possible à l’enfant d’acquérir les compétences, mais l’apprentissage sera plus plus difficile.

Maria Montessori (1870-1952) avec un groupe d’enfants dans une classe à Londres.• Crédits : Kurt Hutton/Picture Post – Getty

Le rôle de l’éducateur

Il doit prendre soin de l’enfant et le défendre avec indulgence, bienveillance, empathie et fermeté. Il doit aider l’enfant à devenir lui-même en suivant un comportement précis.
1-L’observation: l’éducateur doit comprendre chaque personnalité sans faire de comparaison, accepter la singularité et connaître chaque enfant.


2-L’aide utile: l’éducateur doit laisser l’enfant faire seul, ce qui l’emplit de fierté. Il n’intervient que si nécessaire. Il doit reconnaître les périodes sensibles, les moments de concentration de l’enfant et respecter les activités spontanées.


3-La discrétion: l’éducateur ne doit pas juger. Il ne doit être ni trop présent ni absent. Il doit faire la différence entre activité ordonnée et désordonnée, corrigeant cette dernière. Il est un exemple pour l’enfant qui est dans l’imitation. Il doit accepter l’enfant tel qu’il est, pour que ce dernier s’accepte. Avoir confiance en lui et comprendre les émotions. Il doit accompagner l’enfant dans sa construction et son éveil aux autres.


4-La découverte: l’éducateur est le guide intérieur de l’enfant. Il doit reconnaître son élan, son besoin et le laisser libre dans le choix de ses activités. Il est le garant de la relation sociale (adulte/enfant, enfant/enfant) et doit proposer un environnement serein, une présence bienveillante. Il doit communiquer, chercher la coopération.


5-L’environnement: l’éducateur doit proposer un espace, une ambiance, un ordre qui donnent des repères à l’enfant et permettent la confiance. L’organisation permet un meilleur éveil des sens et du langage.

Maria Montessori with children, Pinterest

Les grandes étapes du développement


0/3 ans: Aide moi à être moi-même
3/6: Aide moi à faire seul
6/12: Aide moi à penser par moi-même
12/18: Aide moi à vivre avec les autres (l’adolescence est une nouvelle naissance, un adulte en devenir)
18/24: Je prends ma place dans la société

 

 

Pour aller plus loin


4 comments on “Montessori, oui mais…

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